Olivier Bachelard pour Abus de Ciné
Doté d’un générique et d’interludes élégants, basés sur des silhouettes blanches de chats sur fond noir, ponctués d’effets kaléidoscopiques jouant avec les museaux pointus, et accompagnés de miaulements formant musique, ce nouveau recueil concocté par Les films du nord fait mouche en regroupant quatre courts métrages animés impliquant tous un chat, au rôle tout relatif. « Le tigre et son maître » ouvre le bal, mettant un chat noir en position dominante face à un tigre maladroit, dont les premiers pas à l’écran emporteront le rire des plus petits. Au dessin 2D imitant des coups de pinceaux colorés, ce film parlé aborde apprentissage et rivalité sous la forme d’un joli conte moral.
S’en suit « La pêche miraculeuse », bijou de drôlerie avec un fond écolo (la pollution des mers), dans lequel un chat accompagne un marin sur sa barque, alors qu’il pêche successivement divers aliments, animaux ou objets, destinés à nourrir d’autres créatures qui apparaissent ici on ne sait trop comment… Au graphisme simple, fait de traits de contour noirs légèrement mouvants et d’aplats de couleur, répond un sens de l’humour et du regard assez mordant. « Une fable en délire : La Poule, le chat et autres bestioles » constitue le troisième chapitre, jouant aussi sur la succession des animaux qui kidnappent la poule, ses cinq poussins tentant de la délivrer avec l’aide d’un chat. Graphisme ressemblant au premier film, effets sonores très cartoon pour les multiples bagarres, l’auteur joue avec les notions d’ennemi et d’allié, dans un récit malin et surprenant impliquant toutes sortes d’animaux, et faisant voyager du désert aux glaces du pôle. Le dessin s’orne d’ailleurs de détails simples, comme de petites ondulations, pour évoquer ces changements, qu’il s’agisse des vagues de l’océan ou des dunes du désert. Certainement le film le plus riche du recueil.
Enfin, « Bamboule », au dessin très « enfantin » avec de multiples traits noirs, puis de couleur pour certains personnages (rouge pour la chatte du titre) ou objets (couverture, tableaux, escaliers…), c’est le sentiment de différence et le fait de finalement assumer son poids qui sont au centre du récit. En voix-off le personnage explique les inconvénients, les moqueries, l’attitude des maîtres, les régimes inutiles, jusqu’à affirmer sa personnalité. On soulignera la qualité des enchaînements entre scènes réelles ou fantasmées, l’utilisation de cartons écrits pour certains sons (esprit bande dessinée), et l’humour discret qui émane de l’ensemble. Un point final un peu plus personnel que les autres, sans doute, puisque l’on verra à la fin du film, les photos de la vraie charte qui inspira ce portrait.